Octobre 1939. Séduisante, élégante, voire sophistiquée, rien ne prédisposait Lucie à diriger l'école publique. Nécessité fait loi, la guerre ne lui a pas laissé le choix, pas plus que l'académie de Paris qui vient de lui envoyer par le train dix nouveaux pensionnaires: des petits garçons juifs dont elle ne comprend pas tout de suite pourquoi ils ont dû quitter la capitale. Lucie et Marie, sa fille de sept ans, sont chaque jour confrontées à des situations imprévisibles et souvent graves. Leur histoire est celle des femmes qui ont, du jour au lendemain, remplacé un patron ou un mari, sans expérience et pendant cinq ans.Ici, pas de héros officiels, de grands hommes ou de tirades patriotiques. Pas de politique non plus. Mais, merveilleusement dépeints, la psychologie, l'anxiété, le courage, les jours et les nuits d'une jeune femme de trente ans qui n'a plus de nouvelles de son mari et plus aucun repère. C'est bientôt l'exode – comme on l'a peu souvent décrit. Pas d'essence, les ponts sur la Loire infranchissables, les enfants qu'on perd en route, l'arrivée à La Rochelle. Le retour vers la ville occupée par les Allemands après avoir été bombardée. Les ragots de la commune, le maire franc-maçon, les lettres de Paris qui semblent au bout du monde. La guerre vue de l'arrière comme un immense tableau où des centaines de petits personnages jouent un rôle nouveau pour eux.Une subtile observation des êtres humains, une mémoire sans faille et l'art de raconter une histoire, ont permis à Josette Alia, qui avait sept ans en 1940, d'écrire un très beau roman sur la province française pendant la guerre. Et aussi un merveilleux portrait de femme.