Une des particularités de Cingria, qui n’est pas la moindre, est d’agiter la question la plus vaste qui soit, celle de la réalité. On conçoit facilement dès cet abord l’ampleur de la tâche que s’est assignée Pierre Bergounioux en s’attachant à saisir cet être infiniment mouvant, définitivement inclassable. Poète, philosophe, Cingria le fut tout à la fois, et sans jamais céder aux excès de l’une ou l’autre position. Fut-il un tiède pour autant? Quelques lignes de sa plume suffisent à le démentir.
Le portrait qui nous est ici livré est à la mesure de cette complexité, s’attachant au texte pour le prolonger, saisissant la rêverie par un bout pour mieux en goûter la fuite légère. Pierre Bergounioux, au fil de deux courtes proses excelle, avec érudition parfois, toujours avec passion, à saisir l’essence de cet insaisissable que fut C.-A. Cingria.
Ce volume fait écho au texte de Jacques Réda – qui fut l’initiateur de Bergounioux en la matière – Le bitume est exquis que nous publiions il y a plus de trente ans, et aux textes de Cingria que nous avons eu le plaisir de publier depuis : Le carnet du chat sauvage et Géographie vraie.