Les nouvelles technologies, c'est comme la langue d'Ésope : espace de liberté ou instrument de contrôle ? Diversité culturelle ou uniformisation ? Autonomie de l'individu ou massification et homogénéisation des comportements ? Tout dépend évidemment de leur usage.
« Enfer ou paradis ? » c'est ainsi, déjà en 1979, et à propos de l'ordinateur, que Jean-François Lyotard concluait son ouvrage sur La Condition moderne. La seule façon de résoudre ce genre d'alternative serait, après que l'on a admis que les nouvelles technologies influent sur nos modes de vie, de pouvoir répondre aux deux questions suivantes : que bouleversent au juste ces outils et, surtout, dans quel but ? Et le problème devient soudain beaucoup plus compliqué notamment lorsqu'il y a de l'avenir de l'art et de la création. Contrairement à une idée reçue, les arts traditionnels, peinture, théâtre, danse, etc., n'hésitent guère à s'approprier ces instruments sophistiqués. Ils les intègrent dans leur processus créatif, parfois en les détournant de leur fonction initiale, afin d'accroître la force expressive de leurs œuvres. Cependant, cette alliance n'est pas sans risque. Les nouvelles technologies façonnent de plus en plus une société où les intérêts économiques, la performance, la consommation et le mercantilisme s'accentuent et tendent également à influencer l'art contemporain. La fascination de l'art devant les pouvoirs de la technique ne peut-elle signifier aussi la perte de son autonomie, tant revendiquée par le passé ? L'art ne deviendrait-il pas, dès lors, le complice objectif du désenchantement et de la déshumanisation qu'engendrent certaines de ces technologies dans le contexte du capitalisme libéral qui caractérise notre société ?
Marc Jimenez