« La politique, ce brouillamini d'erreurs et de violences », Mauriac aimait à citer ce mot de Goethe, car il définissait son recul devant les excès de la gauche et de la droite quand elles s'égarent dans leurs passions, leurs fantasmes et leurs croisades. Est-ce à dire que la méfiance de Mauriac devant la démesure de la politique le conduisit à un refus de l'engagement ? Nullement. Jamais homme ne fut plus engagé, — mais au nom de sa foi, et ce fut sa grandeur, dans son action contre l'Église franquiste, puis contre les nazis, puis contre les staliniens, et enfin dans son action pour la décolonisation, où il fut le meilleur soutien de De Gaulle.
Nous avons voulu par ce Colloque éclairer le paradoxe d'un journaliste qui ne fut ni de gauche ni de droite, mais, de l'avis unanime, le plus grand par sa verve, sa fougue, son indépendance farouche et son sens de l'honneur. Il laisse loin derrière lui Sartre et le groupe des petits philosophes étriqués des Temps Modernes, enfermés dans des systèmes dépassés et hors de la vie. Mauriac annonce l'écroulement des idéologies qui ont enténébré notre siècle. La présence à la tête de ce Colloque de René Rémond, accompagné d'une pléiade de chercheurs français et étrangers, et la qualité de leurs débats, nous assurent que le message de Mauriac a été compris, et qu'il retentira sur de nombreux lecteurs.