Il est toujours intéressant de suivre la fortune d'un de nos écrivains à l'étranger ; à voir comment son œuvre a été traduite, interprétée, jugée, voire exploitée ailleurs, souvent le regard change, ou du moins la discussion est relancée. Une enquête sur l'étonnant accueil des comédies de Marivaux en Allemagne n'aboutit pas seulement à établir des faits qui contribuent à l'histoire du théâtre européen, elle permet de changer d'angle, de voir l'œuvre d'un œil un peu neuf et, comme il s'agit de « l'un des vrais maîtres de notre théâtre, l'un des plus français » (M. Arland), d'ouvrir quelques perspectives sur les goûts des deux peuples, sur ce sentiment complexe d'attirance et de défiance qui les a si souvent unis ou séparés. Jacques Lacant, qui connaît bien ces problèmes, présente un ouvrage fondé sur une vaste documentation, mais qui ne s'éparpille point, qui guide toujours vers l'essentiel ; il s'adresse aux comparatistes, aux « dix-huitiémistes », aux historiens et amateurs de théâtre, à ceux qui aiment Marivaux et ne veulent rien négliger pour le mieux connaître, comme à ceux que passionne le perpétuel va-et-vient culturel entre la France et les pays de langue allemande.