Les déesses absentes : en tête d'un essai sur Nerval, un titre semblable évoque immanquablement la figure de la mère de l'écrivain. Pourtant, le pluriel indique que ce n'est pas seulement à la mère que fait allusion pareil intitulé. La formule, au singulier cette fois, appartient à l'auteur lui-même : au cours d'une promenade à Ermenonville, près de l'endroit où fut enterré Rousseau, le narrateur d'Angélique aperçoit « le temple de marbre d'une déesse absente, — qui doit être la Vérité ». Autant que le fantôme de la mère, l'ombre de cette déesse absente plane sur l'œuvre nervalienne. Des récits comme Les Faux Saulniers, le Voyage en Orient ou Les Illuminés (qui constituent le versant moins étudié des œuvres de Nerval) ont mis en question les valeurs qui étaient celles de la France du XIXe siècle.
Le présent essai s'attache à éclairer les causes et les caractères du scepticisme nervalien, au risque d'apporter quelques retouches à l'image consacrée du « doux Gérard ». L'ouvrage examine aussi comment l'œuvre nervalienne passe d'une « déesse absente » à l'autre — de la vérité insaisissable à la mère disparue.