Qui, Moi ? Qui, je ? Ces questions de l'éternel Homme/Narcisse sont celles aussi des philosophes, des linguistes, des psychanalystes ; celles de Descartes et de Freud. Les Cahiers de Valéry cherchent pendant un demi-siècle moins la réponse que la bonne formulation du problème. Demandant des modèles aux sciences et aux philosophies de tous les temps, interrogeant subtilement une sensibilité et une intelligence infiniment alertées, une écriture précise et belle déploie dans des miliers de notes les résultats constamment affinés d'une étonnante enquête. Loin de l'autobiographie, au cœur des expériences universelles nommées désir, langage, douleur, mort, les Cahiers cherchent le plus haut degré de généralité, le Moi-Limite capable, avec ses sens et ses signes, de subsumer la totalité dénombrée des possibles humains. Ce texte difficile, dont l'œuvre publiée paraît maintenant l'efflorescence, est un monument de l'esprit : une immense analyse dont la synthèse restait à faire, un long itinéraire qu'on devait baliser, une Somme laissée en fragments qu'on a ici méthodiquement tenté de construire à partir de l'interrogation centrale d'où la recherche s'étoila. Il faut inscrire dans notre temps le valérysme, philosophie du corps autant que de la connaissance, art de penser et art d'écrire, héritage et forme moderne du rêve ancien de l'ARS MAGNA.