Les tomes 1 et 2 qui rassemblent une trentaine d'articles — le premier, réédition d'un livre qui avait inauguré la Collection d'Esthétique en 1967 — sont l'oeuvre d'un philosophe qui a découvert dans l'esthétique une voie privilégiée vers une philosophie de la nature. Mikel Dufrenne y explore des thèmes qui hantent la réflexion contemporaine sur l'art : l'art comme [non-]langage, l'oeuvre comme objet ou évènement, l'écriture et le style, le jeu, la perception sauvage, le retour vers l'originaire. Chemin faisant, il rencontre les appareils conceptuels en vogue : structuralisme, sémiologie, psychanalyse, marxisme ; il en use, mais avec réserve, sans se laisser séduire ou terroriser ; et c'est en solitaire qu'il poursuit sa route, sans moyens, sans pouvoir. Mais il ne s'y sent pas seul : une esthétique non dogmatique débouche sur le politique, et il veut être l'écho de tous ceux qui en appellent à un art autre, libéré et libérateur, joyeux, et qui rêvent que la pratique de cet art contribue à faire la vie autre dans un monde autre. Mikel Dufrenne n'est pas un philosophe triste. Si vous préférez Thanatos à Eros, ne le lisez pas !