En tant que concept, champ de recherche et outil d’analyse du réel, le genre demeure peu mobilisé en géopolitique. Or, les droits des femmes, ceux des LGBTI, les violences sexuelles et sexistes, les questions relatives au corps, à la sexualité, aux rapports sociaux du sexe, quelle que soit l’aire géographique considérée, deviennent des préoccupations incontournables. En outre, analyser la géopolitique par le genre invite à (re)questionner tous les domaines « classiques » de l’agenda international : la pauvreté, le climat, l’agriculture, la religion, le développement, la santé, les migrations et les mobilités, le travail, le modèle capitaliste et productiviste, le sport, la culture, le militaire, le terrorisme, etc. Réciproquement, il est intéressant d’enrichir, par la géopolitique, les réflexions sur le genre.
Outil de pensée critique, l’approche par le genre a également une fonction programmatique invitant à s’appuyer sur la recherche pour transformer le réel en promouvant la liberté, l’émancipation, la lutte contre les inégalités, le respect de l’autre et de l’environnement, contre les politiques de prédation et les manières virilistes de gouverner. Dans un contexte de crises planétaires, qu’elles soient socio-économiques, financières, environnementales, sanitaires et / ou politiques, prendre en compte la dimension genrée des sujets de l’agenda revêt un intérêt politique et prospectif pour comprendre, mais aussi pour agir. Non seulement pour mieux cibler les populations vulnérables et lever certains tabous sur les violences de genre, pour garantir un développement durable bénéficiant à toutes et tous, mais aussi pour s’appuyer sur la capacité de changement portée par les filles et les femmes dans de nombreuses régions du monde.
Sans prétendre aborder l’ensemble des problématiques relatives aux liens entre genre et géopolitique, ce dossier de La Revue internationale et stratégique vise, sur quelques aires géographiques, à rendre compte de recherches pluridisciplinaires denses et à ouvrir le débat.