Les missions sont aujourd'hui à nos portes.
Si la figure du missionnaire barbu et bienveillant, façon Tintin au Congo, est à ranger au rayon des souvenirs de la mauvaise conscience occidentale, la dynamique de la mission, elle, est toujours à l'oeuvre. Sur tous les continents s'affairent aujourd'hui des ONG, désireuses à la fois de sauver les hommes et de moderniser les sociétés. À leurs côtés s'activent des missions évangéliques, souvent d'inspiration américaine, ainsi que des organisations qui se sont donné pour but de ramener les croyants à l'islam. Pendant ce temps, les missionnaires catholiques et protestants, forts d'une expérience séculaire, continuent, à bas bruit, à convertir les âmes et à soigner les corps.
Or la mission, croyons-nous, est un objet médiologique. Les idées ne voyagent pas toutes seules et ces entreprises de conviction donnent à voir les mécanismes de la conversion. Il s'agit d'abord de faire corps : ordres religieux, confréries, associations, ONG... permettent de recruter ceux qui partent, de les financer, de les protéger, d'en surveiller l'orthodoxie et, en cas de malheur, d'en conserver la mémoire. Il faut aussi faire croire : c'est par l'écrit et l'image, la parole et le corps, que s'exposent les croyances et que l'on gagne les esprits.
L'âge religieux des missions s'était ouvert avec les voyages de saint Paul. Un âge politique lui a succédé, qui s'est clôt sur l'héritage de la Ille Internationale. Le XXIe siècle inaugure un âge idéologique de la mission. Sous nos yeux des prédicateurs, des médecins et des défenseurs des droits de l'homme diffusent sur tous les continents leurs croyances et leurs modes de vie.
D'actualité, l'esprit de mission ? Sans aucun doute.