Si les expositions universelles sont au cœur de l'histoire des pratiques culturelles, elles sont aussi l'un des lieux de naissance de la technique comme utopie du progrès et de la modernité. Parce qu'elles favorisent des rapprochements entre le passé et l'avenir de l'humanité, entre les civilisations du monde, entre la diversité des productions humaines, elles promeuvent un universalisme de la technique. Dans un mouvement réflexif, la technique devient un savoir public, elle intéresse les visiteurs bien au-delà des cercles professionnels. Nouvelle mythologie, elle acquiert une valeur d'identifiant national et le statut de lieu de mémoire. Et pourtant, qu'en est-il, au milieu du xixe siècle et dans le demi-siècle qui suit, des espoirs libéraux et saint-simoniens mis dans l'industrie, à l'heure où l'autonomisation de la technique et les logiques émancipatrices qui lui étaient associées plient sous l'emprise d'une division du travail dont le sens se fait de plus en plus aliénant ? Qu'en est-il aussi de l'admiration pour la technique, alors que s'affirment l'hégémonie des beaux-arts et la sacralisation de l'artiste comme figure du génie ? En lien, quelle place est faite au patrimoine technique éphémère des expositions universelles ?
C'est l'intérêt de ce volume de restituer la complexité des discours, des intentions et des perceptions autour de la technique et de la modernité dans la société française de la seconde moitié du xixe siècle. Cinq thèmes structurent l'ouvrage : les représentations, l'innovation et les savoirs techniques, les produits nouveaux et les stratégies de valorisation, les publics des expositions, le patrimoine technique des expositions.