Jules Mary (1851-1922) est sans doute le feuilletoniste le plus fécond et le plus talentueux de son époque. Il s'était fait une spécialité des romans de la victime injustement condamnée et miraculeusement réhabilitée. Si les héros de Dumas et d'Eugène Sue incarnent la justice divine et se situent d'emblée au-delà du Bien et du Mal, les personnages de Jules Mary sont respectueux de la loi des hommes ; ils se révoltent contre l'injustice de leur sort, mais non pas contre leurs juges ou contre la société. Ils sont broyés par le système, comme le capitaine Dreyfus, et souvent n'échappent à leur sort cruel que par l'intervention du hasard. Au " roman du surhomme " du romantisme répond le " roman de la victime " fin-de-siècle. Les personnages de Jules Mary sont généralement victimes d'erreurs judiciaires. Leur condamnation est toujours injuste et leur réhabilitation infiniment touchante. Car Jules Mary possède l'art de nous raconter de belles histoires ; la plus grande partie de Roger-la-Honte est consacrée à la revanche du héros qui, sous une nouvelle identité, s'acharne à obtenir la révision de son procès et à prouver son innocence.
Roger-la-Honte a paru en feuilletons dans Le Petit Parisien (1886-1887) avant d'être édité et réédité en volumes jusqu'à récemment et même en collection de poche. Le roman a été adapté au théâtre et au cinéma (Jean de Baroncelli, Gaston Roudès, André Cayatte, Ricardo Fredo).
La Pocharde a paru en feuilletons dans Le Petit Journal (1897-1898) ; le roman a été réimprimé d'innombrables fois jusqu'en 1954. Il a été adapté à la scène et à l'écran (Etievant, Jean Kemm) ; il a également fourni la trame pour une bande dessinée.